Lucratif or not lucratif, that is the question !
La détermination du caractère lucratif de votre association est une question primordiale à se poser...avant que l'administration fiscale ne le fasse à votre place.
Le but d’une association n’est pas de réaliser des profits. C’est pour cette raison que les associations ne sont (par principe) pas assujetties aux impôts commerciaux (IS, TVA, CET).
Toutefois, les associations n’échappent pas à l’impôt du seul fait que leur forme diffère de celle d’une société. Elles doivent être considérées comme des organismes à but non lucratif. Par conséquent, un certain nombre de critères doivent être remplis afin d’apprécier le caractère lucratif ou non lucratif d’un tel organisme.
L’association doit remplir cumulativement les trois conditions suivantes :
- Sa gestion doit être désintéressée
- Si la société s’adonne à une activité concurrentielle, alors elle doit exercer cette activité dans des conditions différentes de celle d’une entreprise commerciale
- Elle ne doit pas avoir pour activité de rendre des services à des entreprises qui en retirent un avantage concurrentiel
L’appréciation de la non lucrativité est donc essentielle. Une association remplissant les critères de non lucrativité échappera aux impôts commerciaux. A l’inverse, les conséquences peuvent s’avérer lourdes si l’association ne remplit pas les critères évoqués.
I) La gestion de l’association doit être non intéressée
La gestion de l’association doit être désintéressée. Cette notion est définit par l’article 261, 7-1°-d du Code général des impôts. Selon ce texte, la gestion d’une association peut être considérée comme désintéressée si les trois conditions suivantes sont remplies :
- La gestion de l’organisme est exercée à titre bénévole
- L’organisme ne distribue aucun bénéfice
- Les membres de l’organisme ne peuvent être bénéficiaires d’une part de l’actif composant l’association
A. Que signifie une gestion à titre bénévole ?
Les dirigeants peuvent-ils être rémunérés pour leurs fonctions ?
La totalité des dirigeants, qu’ils soient dirigeants de droit ou de fait doivent être pris en compte.
Les dirigeants ne doivent avoir aucun intérêt à la gestion directe ou indirecte de l’association.
En principe les dirigeants ne doivent pas être rémunérés. Les rémunérations ne se limitent pas aux sommes versées aux dirigeants. Il faut tenir compte de tous les avantages qui leur sont accordés (logement, mise à disposition d’une voiture…). Il faut également prendre en considération les avantages obtenus par personnes interposées ou par le biais d’une filiale de l’association. Le cumul d’une fonction de salarié et de dirigeant peut également s’avérer problématique.
Par ailleurs, les juges ne sont pas sensibles au fait que les dirigeants pourraient apporter certains avantages à l’association. Il est donc impossible de compenser les avantages accordés aux dirigeants avec ceux apportés par le dirigeant.
Tolérance
Il est possible pour un dirigeant d’être rémunéré par l’association à condition que la somme qui est lui est versée n’excède pas ¾ du SMIC, soit 1 140,91€ brut (SMIC au 1er janvier 2019 : 1 521,22 € brut). L’appréciation tient compte de la valeur des avantages octroyés aux dirigeants, des primes diverses, des avantages en nature, de la rémunération…
Cas des grandes associations
Les associations qui disposent de ressources financière propres supérieures à 200 000 € peuvent rémunérer au maximum trois de leurs dirigeants, sans que le caractère désintéressé soit remis en cause.
Toutefois, la rémunération versée à chaque dirigeant ne doit pas excéder trois fois le plafond de la sécurité sociale, soit 10 131 € par mois pour 2019.
Qu’en est-il de la situation des salariés ?
L’association peut recourir aux services de personnes salariés sans remettre en cause le critère de gestion désintéressée. Par ailleurs, les membres de la famille du dirigeant peuvent être salariés si leur rémunération est conforme aux usages du secteur et qu’elle est justifiée compte tenu du travail fourni.
Cette rémunération des salariés ne fait l’objet d’aucune limitation particulière. Les rémunérations doivent conserver un caractère normal.
Par ailleurs, il est admis que les salariés peuvent participer au conseil d’administration avec une voie délibératoire, à condition que leur nombre soit limité à ¼ des membres composant le conseil d’administration et qu’ils y figurent en tant que représentant des élus des salariés.
B. Distribution des bénéfices
Les bénéfices peuvent-ils être distribués aux membres ?
La réalisation de profits n’a pas pour effet de remettre en cause le statut de l’association. Toutefois, l’association ne doit procéder à aucune distribution. Si tel serait le cas, elle perdrait son statut d’organisme à but non lucratif. C’est donc l’affectation des bénéfices et non pas leur réalisation qui peut poser problème.
Pour résumer, si les bénéfices sont affectés au fonctionnement de l’association, cette dernière conservera son caractère d’organisme sans but lucratif. A l’inverse, si l’association procède à des distributions, elle sera considérée comme n’ayant pas une gestion désintéressée.
Le terme de distribution est apprécié de manière large. Ainsi, peut être considéré comme distribution tout prélèvement sur les ressources de l’association qui ne s’inscrit pas dans le fonctionnement normal de l’association.
Attention, il est possible que soit considéré comme distribution, l’absence de réaffectation des excédents dans l’œuvre sociale.
C. Attribution de l’actif
Les membres de l’association peuvent-ils se voir attribuer une part de l’actif de l’association ?
Les membres de l’association ou leurs ayant droits ne peuvent se voir attribuer une part de l’actif de l’association. Seuls les apports qui ont été faits peuvent être repris par les apporteurs, en vertu du droit de reprise.
II) Examen de la concurrence
L’association doit examiner sa situation au regard de la concurrence, c’est-à-dire au regard des opérateurs qui évoluent sur le même marché.
Si l’association ne concurrence pas une entreprise, dans ce cas elle conservera son caractère d’organisme sans but lucratif.
Si l’association concurrence une entreprise commerciale, elle peut toutefois conserver son caractère d’organisme sans but lucratif. Elle doit cependant définir si son activité est exercée selon les mêmes modalités que les entreprises concurrencées :
Si la réponse est affirmative, elle sera considérée comme étant à but lucratif.
Si la réponse est négative, elle conservera son statut d’organisme sans but lucratif.
Attention, si l’association exerce plusieurs activités, elle devra s’adonner à une appréciation activité par activité.
A. Comment déterminer si une association concurrence une entreprise commerciale ?
Pour reprendre la formule des juges, une association ne concurrence une entreprise que si les services qu’elle rend sont « offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ».
L’appréciation doit être faite au niveau du consommateur. L’association doit évaluer si ce dernier est en mesure de choisir entre les produits et services proposés par l’association et ceux proposés par une entreprise.
La situation de concurrence est appréciée sur une certaine zone géographique. Cette zone est fonction de la nature de l’activité.
L’association doit viser le même public et proposer le même service que l’entreprise commerciale.
B. Comment apprécier les modalités de concurrence ?
Toute association qui concurrence une entreprise ne perd pas nécessairement son caractère d’organisme à but non lucratif. Il faut observer dans quelles conditions l’association exerce son activité. Cette appréciation est faite au regard d’un certain nombre d’indices.
La méthode utilisée est grossièrement appelée méthode des 4P. Elle se décompose de la manière suivante :
utilité sociale de l’activité (Produit et Public)
affectation des excédents
prix pratiqués (Prix)
opération de communication réalisée (Publicité)
Il faut donc déterminer si l’association exerce son activité dans les mêmes conditions qu’une entreprise commerciale, au regard des produits qu’elle propose, du public qu’elle vise, des prix qu’elle pratique et si elle fait usage de publicité commerciale.
Comment caractériser l’utilité sociale d’une association ?
De manière générale, il y a utilité sociale si :
L’association intervient dans un domaine où la demande n’est pas suffisamment comblée par le secteur lucratif
ou
L’association s’adresse à un public qui ne peut normalement accéder aux services du secteur commercial
Il est donc possible de mettre en avant deux notions : le public visé et les produits et services fournis
- Produits et services fournis
L’association est considérée comme d’utilité sociale lorsque les produits ou les services qu’elle propose ne sont pas (ou peu) offerts par les opérateurs du secteur lucratif. Par exemple une association de golf qui proposerait un parcours adapté spécialement aux débutants, offrirait un service dans des conditions différentes à celles proposées par un vrai club de golf.
- Le public visé
L’association peut conserver son statut d’utilité sociale au regard du public qu’elle vise. Elle doit s’adresser à des personnes qui pour des raisons économiques ne peuvent accéder aux services offerts par le marché. Cette appréciation peut également être faite au regard de la situation économique et social des bénéficiaires (chômeurs, handicapés…). Par exemple, sera considérée comme étant d’utilité sociale une association qui encadre un public nécessitant une assistance sociale dans un village de vacances.
Comment doivent être appréciés les prix pratiqués par l’association ?
Une appréciation au niveau des prix doit être faite. Ces derniers doivent se différencier de ceux pratiqués par les entreprises commerciales. La comparaison doit être faite entre les mêmes services et les mêmes produits.
De manière générale, l’une des trois conditions suivantes doit être remplie :
Les prix sont homologués par l’autorité administrative
Les prix sont nettement inférieurs aux tarifs pratiqués par le secteur marchand
Les prix sont adaptés à la situation sociale des bénéficiaires
Une association peut-elle recourir à la publicité ?
De manière générale, une association qui concurrence le secteur marchand ne doit pas avoir recours à la publicité commerciale.
Toutefois, l’association peut recourir à certaines formes de communication. Ainsi, ne remettra pas en cause le statut d’organisme à but non lucratif :
L’usage d’opérations de communication destinées à faire appel à la générosité du public
La diffusion d’informations sur les prestations ou produits qu’elle fournit à conditions que cette voie de communication ne s’apparente pas à de la publicité commerciale destinée à capter un public similaire à celui des entreprises commerciales
Comment traiter les excédents réalisés ?
Il est possible pour l’association de réaliser du profit. Toutefois, l’association doit réinvestir les excédents dans son activité. La non réaffectation des excédents peut conduire à faire perdre à l’association son caractère d’organisme à but non lucratif.
III) Entretien de relations privilégiées avec des entreprises
L’entretien de relations privilégiées avec des entreprises peut conduire à faire perdre son caractère non lucratif à une association. Tel est le cas lorsqu’une association rend des services à des entreprises qui en sont membres. Dans ce cas, l’association contribue au développement de l’activité de ses membres.
Certaines associations ne perdent pas leur caractère d’organisme sans but lucratif :
Les associations qui jouent un rôle fédératif pour leurs membres (union, fédération…)
Les associations relevant de la défense collective des intérêts moraux ou matériels de ses membres
Les services rendus aux membres pour les besoins de leur activité non lucrative
IV) Consultation de l’administration
L’administration a mis en place un correspondant dédié chargé de renseigner les associations sur leur situation fiscale (https://www.impots.gouv.fr/portail/contacts).
L’Administration est tenue de répondre dans les trois mois . Les positions prises par le correspondant sont opposables à l’administration sur le fondement de l’article L 80 B du Livre des procédures fiscales. Attention cette prise de position engage l’Administration sur la base des informations qui lui sont communiquées.
Un questionnaire est fourni par l’administration. Il est donc important de remplir ce document avec précaution.
Le schéma ci-joint résume de manière global le cheminement à réaliser afin de déterminer si oui ou non, une association doit être soumise aux impôts commerciaux.
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